L’OCCAR a mandaté Artec GmbH pour la livraison de 222 véhicules de combat d’infanterie Schakal, appelé aussi Jackal, destinés à l’Allemagne et aux Pays-Bas.
La commande, annoncée officiellement par Rheinmetall le 20 octobre 2025, porte sur 150 exemplaires pour la Bundeswehr et 72 pour l’armée néerlandaise.
Montant global et répartition industrielle
Le volume financier total communiqué tourne autour de 4,7 milliards d’euros pour l’ensemble du contrat, dont la part revenant à Rheinmetall s’élève à près de 3,4 milliards d’euros. Le contrat englobe non seulement la fourniture des véhicules mais aussi un paquet logistique complet composé de pièces de rechange, de matériels de formation et d’outillages spécialisés. Des options permettent par ailleurs de commander jusqu’a 248 véhicules additionnels, ce qui crée une flexibilité significative pour un renforcement futur des capacités.
Qu’est-ce que le Schakal ?
Le Schakal n’est pas un véhicule entièrement nouveau au sens de la plate-forme : il couple le châssis 8×8 du Boxer, véhicule blindé modulaire éprouvé au service de plusieurs armées européennes, et la tourelle roulante du Puma, un système de tourelle téléopérée initialement développé pour véhicule blindé à chenilles. Cette association vise à tirer parti de la mobilité et de la modularité du Boxer tout en conservant la puissance de feu et les fonctionnalités de la tourelle Puma. La tourelle embarque notamment le canon MK 30-2/ABM de calibre 30 mm, adapté pour traiter une large gamme de cibles en situation de combat dynamique.
Un choix pragmatique
En clair, la formule Boxer + Puma cherche à offrir un compromis : mobilité stratégique sur routes et pistes grâce au 8×8, protection modulaire via des modules de mission interchangeables, et puissance de feu suffisante pour les engagements dits « de forces moyennes ». Le concept cadre avec la doctrine allemande récente qui mise sur la création de forces médianes rapides, capables de couvrir de longues distances et d’opérer en mobilité tout en gardant une certaine autonomie tactique.
Aspects industriels et gouvernance du programme
Artec GmbH, le maître d’oeuvre pour la livraison, est une coentreprise (joint venture) détenue à hauteur de 64% par Rheinmetall et 36% par KNDS Germany. L’OCCAR (Organisation Conjointe de Coopération en matière d’Armement) gère le contrat-cadre et supervise la coordination entre nations et industriels, ce qui facilite la mutualisation des budgets et l’harmonisation technique entre utilisateurs européens. Le fait que Rheinmetall soit principal contributeur industriel explique la part élevée du groupe dans la valeur du contrat et la visibilité politique du dossier.
Capacités opérationnelles et options de protection
La tourelle 30 mm embarquée permet d’engager efficacement des cibles légères et des menaces blindées légères, tandis que le véhicule, par sa conception Boxer, offre des possibilités d’amélioration de la protection (kits add-on), d’intégration de systèmes de détection d’attaques et de contre-mesures, notamment pour la protection contre les armes antichars portatives, la détection de tirs et l’identification d’attaquants, ainsi que des dispositifs de défense contre les drones. Ces options montrent que l’appel d’offres a intégré les leçons des conflits récents où la menace asymétrique, les munitions guidées et les drones pèsent fortement sur la conception des blindés modernes.
Calendrier et calendrier de livraison
Les calendriers annoncés établissent des livraisons réparties entre 2027 et 2031 pour la tranche initiale, ce qui crée une fenêtre de montée en cadence industrielle sur plusieurs sites et laisse du temps pour les essais en conditions réelles, l’adaptation des chaînes d’approvisionnement et la formation des équipages et des maintenanciers. Ce phasage est important pour limiter les ruptures logistiques et absorber les transferts technologiques nécessaires à la mise en service.
Quels enjeux pour l’Europe ?
Stratégiquement, ce programme illustre la tendance européenne à favoriser des solutions coopératives: achats groupés via OCCAR, industrialisation en consortiums transnationaux (Artec), et partage de capacités entre armées. C’est aussi un signe que la modernisation des forces terrestres passe par des plateformes modulaires et interopérables. En termes d’emploi et de chaîne d’approvisionnement, un tel contrat génère des retombées industrielles importantes, mais il pose aussi la question de la dépendance à un petit nombre d’acteurs majeurs pour des composants.
TL;DR
La commande de 222 Schakal marque une étape tangible dans la transformation capacitaire des forces allemandes et néerlandaises: modernisation, interopérabilité et montée en puissance industrielle. Reste à suivre la livraison, la mise en service et surtout l’adaptation des concepts d’emploi pour mesurer pleinement l’effet opérationnel de cet investissement.
